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Eugénisme 2.0 : Quand IA et génétique redessinent l’humanité

Photo du rédacteur: Steve MoradelSteve Moradel

Génétique

Toute ressemblance avec l’Histoire serait purement fortuite. Chasser l’idée de perfection par la porte et elle revient par les laboratoires, plus froide et plus insidieuse que jamais.


Les progrès de la génétique et de l’intelligence artificielle (IA) ont ouvert la voie à des pratiques qui semblaient autrefois relever de la science-fiction. L’une d’entre elles est la possibilité de sélectionner des embryons en fonction de leurs caractéristiques génétiques, une démarche qui soulève des questions éthiques et sociétales majeures.


La société Heliospect Genomics  propose des services de sélection génétique d’embryons basés sur des critères non médicaux, comme des traits physiques ou cognitifs. Rreste à voir si la technologie d’Heliospect fonctionne comme on le prétend. Bien que le QI soit déterminé en partie par la génétique, il n’y a pas simplement un gène pour « intelligent » qui peut être désactivé ou activé ; au contraire, le QI d’une personne est influencé par un ensemble complexe et intriqué de dizaines de gènes différents – sans compter que l’intelligence elle-même est un concept glissant et notoirement difficile à mesurer.


Et au-delà de la question de savoir si quelque chose comme ça pourrait fonctionner comme promis, il y a des préoccupations éthiques biomédicales évidentes

Cela banalise le néo-eugénisme et amplifie les inégalités en réservant ces technologies aux plus riches. Une évolution inquiétante qui, derrière des avancées scientifiques fascinantes, cache des dérives graves.


Aujourd’hui, grâce à la fécondation in vitro et au diagnostic génétique préimplantatoire (DPI), il est possible de choisir des embryons selon leurs caractéristiques génétiques. Si ces techniques étaient initialement conçues pour prévenir des maladies graves, elles servent désormais à répondre à des aspirations beaucoup plus discutables : choix du sexe, traits physiques, et demain, pourquoi pas, des prédispositions intellectuelles. Avec l’appui de l’intelligence artificielle, ces pratiques gagnent en précision et permettent une analyse toujours plus rapide et détaillée du génome.


Ce glissement vers une personnalisation génétique à la carte ouvre une véritable boîte de Pandore. Ce qui aurait pu se limiter à des objectifs médicaux se transforme en un néo-eugénisme à peine voilé, où la médecine devient l’outil d’une sélection et d’une optimisation humaine. Et, comme toujours, seuls les plus fortunés accèdent à ces privilèges, ce qui aggrave encore le fossé des inégalités sociales et biologiques.


L’engouement démesuré pour des technologies comme CRISPR, ce scalpel moléculaire qui modifie l’ADN, ou Neuralink, qui ambitionne de connecter le cerveau humain aux machines, illustre parfaitement cette dérive. Ces outils, conçus avec des intentions médicales nobles, se retrouvent déjà utilisés dans des contextes où la frontière entre soin et transgression devient dangereusement floue.


Aux États-Unis, certaines cliniques contournent les cadres éthiques pour proposer des modifications génétiques à des fins purement esthétiques ou non médicales. Ces exemples, loin d’être isolés, témoignent d’une tendance préoccupante : le progrès technologique, souvent détourné, sert ici des ambitions personnelles ou des logiques économiques, au mépris de l’intérêt collectif.


Ces dérives posent des questions fondamentales : que reste-t-il de notre humanité lorsque la science s’arroge le droit de la redéfinir ? L’élimination de traits génétiques jugés indésirables risque d’appauvrir la diversité humaine. Et l’inégalité d’accès à ces technologies révèle déjà les contours d’une humanité à deux vitesses : d’un côté, les riches capables d’optimiser leurs descendants ; de l’autre, les laissés-pour-compte, condamnés à subir cette révolution en spectateurs impuissants.


Les garde-fous éthiques, tels que la Convention d’Oviedo, restent malheureusement trop souvent contournés ou ignorés. Dans les pays qui ne l’ont pas ratifiée, ou là où la réglementation reste laxiste, les pratiques les plus discutables prolifèrent. Cela montre l’urgence d’un cadre juridique global et harmonisé pour encadrer ces technologies.


Certes, les avancées en IA et en génétique ouvrent des perspectives fascinantes. Mais elles exigent une vigilance constante. La science doit rester un outil, et non un maître, guidé par une éthique intransigeante, seule capable d’empêcher l’irrémédiable : Réécrire le livre de la vie….



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©2019 par Steve Moradel

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